- Qui êtes-vous ?
- Comment est né le projet Bardane ?
- Parlez-nous de votre association Bardane.
- Avez-vous rencontré des difficultés aux débuts de l’association Bardane ?
- Avez-vous également eu de belles surprises ?
- Quel est votre moteur pour vous lever tous les matins ?
- Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui hésite encore à se lancer dans son projet entrepreneurial ou associatif ?
- Bardane
L’association Bardane a été créée par trois jeunes femmes en quête de sens pour cultiver la résilience des territoires. Elles accompagnent aussi bien les collectifs citoyens et associations que les collectivités, et même les entreprises qui portent un projet de transition impactant leur territoire.
Florence Riesser
Coordinatrice de l’association Bardane
Qui êtes-vous ?
Je m’appelle Florence Riesser. J’ai grandi dans la campagne lorraine, dernière d’une famille de 5 enfants. Plutôt bonne élève, après le lycée, je me suis dirigée vers une école d’ingénieurs, l’Ecole Européenne d’Ingénieurs en Génie des Matériaux (EEIGM), à Nancy, qui m’a donné l’occasion de réaliser de nombreux stages et cours à l’étranger.
J’ai ensuite choisi une orientation Bâtiments et Environnement grâce à un Mastère Spécialisé en Construction et Habitat Durables, coaccrédité par l’ESTP et l’ENSAM Arts&Métiers, à Paris.
Après un rapide passage en R&D chez Bouygues Construction, j’ai voulu rejoindre une structure plus petite, plus humaine et plus proche du terrain. En 2012, j’ai donc intégré un petit bureau d’études pour accompagner les démarches d’éco-conception et les certifications environnementales de bâtiments tertiaires, dans toute la France.
Au bout de 4 ans, je n’étais plus sûre d’avoir un réel impact positif. Les certifications environnementales me semblaient plus un effet de communication qu’une réelle transformation. Je travaillais beaucoup et je me déplaçais en avion, de chantier en chantier, presque jamais chez moi, et pas très heureuse.J’avais l’impression à 27 ans d’être un stéréotype de business woman. Je me suis rendu compte que je ne voulais pas de cela.
En 2017, j’ai décider d’arrêter ça et je suis partie pour un tour du monde. Au-delà du plaisir intense de la découverte de nouveaux continents, cela m’a permis de me poser beaucoup de questions sur la manière dont je voulais vivre, l’impact que je voulais avoir et les valeurs que je voulais défendre.
Comment est né le projet Bardane ?
De retour de mon voyage, courant 2018, j’ai rendu visite à mes parents dans mon village d’enfance. Lorsque l’on m’interrogeait sur mes projets, je parlais toujours de transition écologique. Mais je me retrouvais face à une défiance de ce terme « d’écologie ». J’entendais « Les Parisiens viennent de découvrir le compost, tant mieux pour eux. Mais nous, on le fait depuis longtemps ! » ou « Ils disent qu’il faut faire du vélo, mais ici comment on fait ? On a au moins 20 km à faire sur une route où passent des centaines de camions ! »
J’ai pris conscience du décalage qu’il y avait entre le monde rural et le monde urbain sur ces sujets, et à quel point la communication et l’ingénierie de l’écologie était formatée pour un public urbain, laissant de côté une partie des citoyens. Cela résonnait avec une idée que j’entendais beaucoup dans mes cercles d’amis, comme une vérité communément admise : l’ingénierie est forcément dans les villes, car c’est là qu’on en a besoin.
La fille de la campagne en moi était déterminée à révéler le besoin d’une ingénierie bien spécifique en ruralité, et à y répondre. Pour moi, la transition environnementale est un levier de développement pour les territoires ruraux. Une opportunité pour améliorer la qualité de vie tout en respectant l’écosystème dans lequel on se trouve.
J’ai profité de mon installation à Lyon en 2019 pour intégrer la pépinière d’Initatives d’Anciela, une structure d’accompagnement qui encourage les projets autour de la transition écologique et solidaire. J’y ai rencontré Carole et Jolet, avec qui nous avons créé l’association Bardane en février 2020.
Parlez-nous de votre association Bardane.
Notre association s’appelle Bardane, et sa mission est d’accompagner les transitions sociales et environnementales des territoires ruraux, cultiver la résilience et contribuer à leur revitalisation.
Nous sommes partis du constat qu’il y avait beaucoup à faire dans les villages, en matière de transition écologique, d’économie sociale et solidaire et d’implication citoyenne. Il y a beaucoup de personnes et de structures motivées pour faire bouger les lignes. Mais qui souvent s’épuisent. Car les informations et les ressources sont difficiles d’accès, et qu’elles ont du mal à trouver des alliés.
Pourtant, dans les villages où les projets se concrétisent, on assiste à une véritable revitalisation : de nouveaux habitants, de nouvelles activités et les projets attirent les projets. L’écologie est un vrai levier de développement économique et social. C’est en considérant toutes ces dimensions ensemble que l’on construit la résilience des territoires : la capacité à résister à des chocs et à des crises. La notion est très actuelle, il est urgent de la prendre en compte.
C’est pourquoi, nous accompagnons les collectivités, aussi bien que les associations et les entreprises, dans leurs projets. Nous apportons des compétences techniques, mais pas seulement, car ce n’est pas suffisant pour créer une émulation. Nous croyons beaucoup à l’importance du dialogue territorial, et facilitons donc les interactions entre différents acteurs du territoire, et surtout la participation des habitants aux projets. C’est souvent parce que les collectivités et les associations se connaissent mal et ne s’entraident pas que les projets sont bloqués. La coopération est pour nous une valeur fondamentale.
Nous voulons aussi sortir du discours centré sur les villes. Nous voulons montrer qu’il se passe beaucoup de choses inspirantes à la campagne. C’est pourquoi nous organisons des événements et mettons en valeur des initiatives innovantes en milieu rural.
Dans un monde en crise, la créativité, c’est la clef !
En fait, nous sommes un facilitateur de projets durables en milieu rural. Une sorte de couteau-suisse de la transition écologique, qui s’active là où il y en a besoin.
Avez-vous rencontré des difficultés aux débuts de l’association Bardane ?
L’association se place dans un écosystème complexe où agissent les collectivités, les institutions, des associations, des acteurs privés, etc. Il nous a fallu un moment pour décrypter cet environnement. Trouver où étaient les manques, ce qui faisait que les territoires ruraux ne profitaient pas des dynamiques en cours, sur quoi s’appuyer pour avancer.
Ensuite, il a fallu se faire une place dans cet écosystème, être identifié. Pour ma part, je venais d’arriver en Auvergne-Rhône-Alpes et je n’avais pas de réseau professionnel. Je l’ai donc construit à petit pas.
Évidemment, le modèle économique est un sujet en soi. Les petites collectivités ont peu de moyens, les associations et porteurs de projet encore moins. Il faut trouver d’autres pistes de financement. C’est là que réside le challenge. Mais c’est exactement parce que c’est difficile et peu rentable que personne n’agit en milieu rural.
C’est donc pour cela que c’est nécessaire de le faire.
Avez-vous également eu de belles surprises ?
J’ai été (et suis toujours) étonnée de la bienveillance de beaucoup d’acteurs, publics et privés, lorsque nous présentons l’association Bardane. Il y a une réelle envie de faire avancer les choses, de créer du lien, de trouver des synergies. Chaque contact m’a mis en relation avec d’autres acteurs clés, et j’ai trouvé que le réseau se construisait vite.
On sent qu’on arrive au bon endroit au bon moment, qu’on répond à un réel besoin. Des élus qui nous disent « Vous êtes exactement ce qu’il nous faut. », ou « On cherchait des structures qui proposaient des formations sur les sujets innovants et on ne trouvait pas dans notre secteur. ». Évidemment ça fait plaisir, ça veut dire qu’on ne s’est pas trompé dans notre mission.
Quel est votre moteur pour vous lever tous les matins ?
Le sentiment d’apporter une réelle contribution pour que le monde aille sur un chemin plus durable et résilient.
D’être complètement alignée dans mes valeurs, mes envies.
Je me nourris de toutes les rencontres exceptionnelles que permet ce projet, avec des personnes bienveillantes, pleines d’énergie, avec qui c’est un plaisir de travailler.
Et surtout des retours positifs de nos bénéficiaires, c’est extrêmement gratifiant !
Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui hésite encore à se lancer dans son projet entrepreneurial ou associatif ?
D’abord sentir et utiliser l’énergie que donne un projet complètement aligné avec ses valeurs, ses envies et sa personnalité.
Ensuite, se rappeler que les choix ne sont pas définitifs, que rien n’est irréversible. Se lancer, essayer, et si ça ne fonctionne pas, on fera autre chose ! Je trouve que ça enlève un grand poids, une grande responsabilité.
Et, enfin, ne pas rester seul avec son projet. En parler, s’entourer, se faire accompagner. Même échanger avec d’autres entrepreneurs, pour se rendre compte que nos difficultés ne sont pas uniques. Et célébrer aussi les réussites.
Bardane
L’association Bardane a pour but d’accompagner la transition sociale et environnementale afin de renforcer la résilience des territoires ruraux. C’est une association à but non lucratif (loi 1901) créée à Lyon en 2020, et qui rayonne en région Auvergne-Rhône-Alpes et dans le sud de la région Bourgogne-Franche-Comté.